Monday, May 4, 2009

LOYER / Quand le loyer des appartements prend l’ascenseur !



À Port-au-Prince, meublés ou non, les appartements en location coûtent une fortune. Dans bien des cas,le loyer est fixé selon la tête du client.

Les mains en l’air, Mamyse*, une mère de deux enfants, se plaint de ne pouvoir trouver deux chambres à louer à un prix abordable à Pétion-Ville. Sous un soleil de plomb, ce samedi de janvier, elle crie ses misères aux « courtiers » de la Place Boyer. « Messieurs, demande la jeune femme, où puis-je trouver deux pièces à louer ? ». « Il y en a beaucoup jèn nègès. J’ai quatre appartements. Deux à Jacquet, un autre à Péguy-Ville et le dernier à Bèl-Vil. Tous à 600 US par mois. Celui de Péguy-Ville, toutefois,est négociable », lui répond l’un des intermédiaires.

Et un autre d’ajouter : « À Delmas 75, par contre, j’ai un appartement qui te coûtera 70 000 gourdes l’an. Si tu es prête bèl nègès, on y va ». Mais Mamyse n’a pas plus que 50 000 gourdes en bourse. Il y a trois mois, son actuel locateur lui avait notifié l’augmentation du coût du bail, d’un ton qui laissait peu d’espoir pour des négociations. Désabusée, la jeune mère optera pour l’un des plus grands bidonvilles de Pétion-Ville où elle finit par trouver un petit studio de deux pièces à moins de 40 000 gourdes, l’an.

Le prix du loyer à Port-au-Prince ?Il n’y a pas que les Haïtiens qui soient victimes de cette situation. Quand il s’agit d’étrangers, surtout de fonctionnaires de la mission onusienne, les propriétaires doublent ou triplent le prix. Beth, une Américaine dans la trentaine, travaille en Haïti depuis quelques années pour le compte d’une organisation internationale.

« À mon arrivée, j’habitais, à Delmas 75, dans un appartement de 14 pièces, loué pour environ 800 dollars américains le mois », explique l’Américaine, alors qu’à Pélérin, il y a environ deux ans, elle payait trois chambres à 750 dollars. « Bien sûr, après de houleuses discussions avec le propriétaire qui souhaitait augmenter le prix », témoigne-t-elle. Aujourd’hui, Beth vit à Péguy-Ville où elle paie un loyer mensuel de 300 dollars pour un appartement non meublé de trois chambres.

Pedro, un employé de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), a à peu près connu le même scénario. Pourtant, il ne s’en plaint pas. « Vous voulez une maison confortable ? Alors, vous payez cher », soutient Pedro. Depuis 2005, il vit à Morne Calvaire où il a loué une maison de 4 chambres à 2 400 US par mois, sans compter les factures d’électricité, d’eau et de carburant pour la génératrice en cas de coupure électrique.

Soucieux de leur sécurité, la majorité des étrangers en mission à Port-au-Prince optent pour les hauteurs. Les petites bourses, quant à elles, n’ont d’autre choix que les bidonvilles ou les pentes des mornes dénudés.

Fixation excédentaire : un délit !

Le secteur immobilier est de plus en plus rentable à Port-au-Prince à cause des demandes en location qui vont crescendo. Il arrive que des propriétaires louent leurs maisons résidentielles et se cherchent une maison à un meilleur prix que celui demandé pour les leurs. Cependant, suivant la loi, tout propriétaire souhaitant donner en location sa maison, ne peut le faire qu’après l’expertise de la Direction générale des impôts (DGI).

« Au regard de la Loi du 19 juillet 1961, le propriétaire qui désire louer sa maison devra faire une déclaration au Bureau des contributions qui, après expertise et d’un commun accord avec le propriétaire, déterminera l’estimation locative de la propriété », souligne le juriste Samuel Madistin. « Après fixation de l’impôt, poursuit Me Madistin, le propriétaire qui aura passé outre à la valeur établie est passible d’une amende de 50 à 1000 gourdes ou d’un emprisonnement de cinq jours à trois mois ».

Me Madistin est conscient que « la loi est dépassée. Il n’y a aucune surveillance. Les propriétaires en profitent pour monter les prix quoique la fixation excédentaire (surestimation des coûts de loyer) soit un délit ».


* Tous les noms figurant dans ce reportage sont des noms d’emprunt.


Extrait de la Loi du 19 juillet 1961…

Article 4.Toute augmentation de loyer est interdite même en cas de changement de locataire. Le loyer mensuel de tout immeuble doit être identique au montant qui a servi de base au paiement de l’impôt locatif. Si, après avoir loué un immeuble, le locataire se rend compte que la fixation du loyer mensuel a été faite à l’encontre de cette base, il pourra refuser de continuer à payer sur cette base excédentaire et se référer au Service de l’imposition locative qui lui délivrera un certificat attestant l’estimation locative de la maison en question. Muni de ce certificat, il procèdera contre son bailleur dans les formes prévues à l’article 2 de la présente loi.



Lundi 21 janvier 2008

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