Monday, May 4, 2009

FOOTBALL / FUNERAILLES NATIONALES / Ultime hommage à Emmanuel Sanon !



Dans une mosaïque d’uniformes scolaires, le stade Sylvio Cator a accueilli, ce mercredi 5 mars, environ huit mille personnes pour honorer la mémoire d’Emmanuel « Manno » Sanon, mort d’un cancer du pancréas, le 21 février dernier, à 56 ans.


Il fait 7 h au stade Sylvio Cator. Un dispositif de sécurité impressionnant, assuré par la garde présidentielle et les corps spécialisés de la Police nationale d’Haïti (PNH), s’observe aux environs du stade. La dépouille mortelle d’Emmanuel « Manno » Sanon est exposée au centre du terrain devant un stand qui rassemble sa famille, ses proches et ses coéquipiers de la fameuse sélection « Toup pou yo » de 1974.

Aux quatre coins du stade, des portraits géants du premier buteur de l’histoire d’une sélection nationale haïtienne en phase finale de Coupe du monde s’exposent au regard des participants. Le décor est planté. Au fur et à mesure arrivent des membres des délégations des clubs de football, des sympathisants, des passionnés, des représentants et chefs de partis politiques, des représentants du Pouvoir judiciaire, d’autres du Législatif et d’autres encore de l’Exécutif.

La grande majorité demeure les délégations d’élèves. Ces derniers caquètent chaque fois que l’on diffuse le morceau musical identifiant la Sélection de 74. Mais les yeux restent figés sur le centre du terrain. On passe devant le cercueil dans lequel repose la dépouille mortelle et on s’y arrête rien que pour quelques secondes.

Manno : « Le chevalier du football haïtien »

Ce mercredi, on dirait que le stade revivait les exploits de Manno et qu’il s’agissait de son dernier match. À cor et à cri, on citait son nom ou on l’applaudissait. Même le président René Préval et le Premier ministre Jacques Édouard Alexis se mêlaient de la partie avec les hauts fonctionnaires de l’État. Philippe Vorbe, Jean-Claude Désir dit Tom Pouce et Ernst JeanJoseph, tous trois coéquipiers et joueurs préférés de Manno sur le plan local, ne peuvent contenir leurs larmes.

« C’est quelque chose de spécial auquel on ne s’attendait pas vraiment », confie Vorbe, très ému par l’ampleur de cette cérémonie qui honore, a-t-il dit, toute la promotion des années 70. « C’est une partie de nous qui s’en va », a conclu l’ancien milieu de terrain de « Toup pou yo », qualifiant Manno de « chevalier du football haïtien ». Interviewé par le reporter du Matin, Tom Pouce a préféré insister sur les talents du plus grand attaquant de l’histoire du football haïtien.

Pour Ernst Jean-Joseph, coéquipier du premier buteur de l’histoire d’une sélection nationale haïtienne en phase finale de Coupe du monde, dès qu’on évoque le nom de Manno Sanon, de grands souvenirs lui remontent.

L’immortel

Selon Reynald Dévilmé, ancien coéquipier de Manno en sélection nationale et au Don Bosco de Pétion-Ville, celui-ci avait un rêve. Celui de voir Haïti participer à une autre Coupe du monde. Il a décrit Manno Sanon comme « un symbole pour la nation haïtienne, un homme simple et modeste ». Le président de la Fédération haïtienne de football (FHF) considère les funérailles nationales de Manno Sanon comme un « devoir de mémoire, un devoir de réparation » envers la Sélection de 1974.

Yves « Dadou » Jean Bart, témoin de l’évolution du célèbre joueur en tant que chroniqueur sportif des années 70, a appelé les jeunes à suivre l’exemple de ce fils des quartiers populaires. Dans cette lignée, le président du Don Bosco de Pétion-Ville a déclaré que le numéro « 10 », porté par l’emblématique joueur au sein du Don Bosco, ne sera plus porté au sein du Club, et a remis un maillot du club frappé de ce numéro fétiche, à la veuve du défunt, en signe de reconnaissance.

Le ministre de l’Éducation nationale voit également en Manno un modèle pour la jeunesse haïtienne. En ce sens, a annoncé Gabriel Bien-Aimé, le championnat interscolaire sera bientôt rebaptisé « Coupe Emmanuel Sanon ». Mannno a fait ses débuts dans le championnat interscolaire où il a été sacré champion dans la catégorie U-17. Le ministre Bien-Aimé a lancé un appel à l’unité. « Haïti est comme une équipe de football. Nous formons une équipe pour gagner le championnat contre la misère, contre l’analphabétisme », a-t-il martelé.

D’un autre côté, le ministre de la Jeunesse et des Sports et de l’Action civique, Fritz Bélizaire, a évoqué les performances d’Emmanuel Sanon dans le championnat scolaire, la Coupe Pradel, la Sélection nationale en tant que joueur mais aussi en tant qu’entraîneur. « Manno est parti pour l’autre monde, mais il ne mourra jamais dans l’esprit et le cœur des Haïtiens, car son nom constituera une référence pour les sportifs, toutes générations confondues. Les jeunes d’aujourd’hui et de demain doivent et devront prononcer son nom avec ferveur parce qu’il est la preuve de notre potentialité […] », a déclaré Fritz Bélizaire.

Le leader politique Evans Paul s’est ainsi exprimé au terme des funérailles : « Ce 5 mars est un jour important pour le foot haïtien, mais également pour l’image du pays. L’image de solidarité, particulièrement des jeunes de moins de 30 ans qui n’ont pas véritablement connu Manno. C’est le moment de reconnaissance des valeurs ».

La cérémonie prit fin aux environs de 10 heures, après la sonnerie aux morts jouée par un musicien de la fanfare du Palais national. Le cercueil a été porté jusqu’à la barrière sud du stade Sylvio Cator par les membres de la Sélection nationale « Toup pou yo ». Le cadavre de Emmanuel « Manno » Sanon a été, quelques minutes plus tard, incinéré dans une entreprise funéraire de la capitale.

Jeudi 6 mars 2008

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